LE SAFRAN DU QUERCY DANS L’HISTOIRE

Les archives confirment l’importance de la culture du safran Quercynois pendant au moins quatres siècles jusqu’à la révolution ; elles nous apprennent également qu’il fut l’un des meilleurs d’Europe.

Durant cette période, la production régionale a atteint des sommets avec l’apparition de foires au safran ; selon des documents de marchands et de courtiers du XVI siècle, le Quercy Rouergue et l’Albigeois réunis auraient produit en 1560 près de 60% de la production nationale qui se comptait alors en dizaine de tonnes. On l’exporte vers Lyon pour teindre la soie mais aussi vers Marseille, La Rochelle, Londres et l’Allemagne.

La fin de la mode des épices dans la cuisine, à partir de la révolution, limite considérablement la production française. le safran subsiste seulement dans les jardins familiaux du canton de Cajarc et de ses environs.

Ces enclos de pierres sèches, jardins de nos grand-mères, ont conservé quelques touffes pour subvenir aux besoins des traditions culinaires de la gastronomie locale riche en plat au safran..

Quelques extraits des archives locales

Bibliographie : « Le safran du Quercy » de Christian Agrech aux éditions Quercy Recherche 2002

EN QUERCY UNE CULTURE AGRICOLE


Le safran a été très cultivé dans le Quercy du XIVè jusqu’au XVIIIè siècle.

Cette culture a fait l’objet de conventions très précises, elle avait fait naître un métayage spécialisé.

  •  1436 Des « saffraniès » sont attestés à Cajarc au terroir de las parras.
  • 1468 Un saffranié à Saint Cirq Lapopie terroir de fontanela et à côté de la fontaine de porte roque.
  • 1589 Le safran était cultivé en particulier à Caussade … mais aussi à Albas, à Bélaye et Saint Antonin. 

LES SEIGNEURS POSSEDAIENT DES SAFRANIERS

  • 1436 Un « saffranié » est attesté près du port de Montbrun qui appartenait au seigneur du lieu.
  • 1482 Le seigneur de Saint Sulpice possédait un « saffranié » à Cajarc

LA ROUTE DU SAFRAN AU MOYEN AGE, UN COMMERCE ET DES FOIRES AU SAFRAN DU QUERCY

Facile à transporter, à conserver et d’une valeur intéressante le safran constitue aussi une véritable monnaie d’échange.
 

  • 1534 Les relations commerciales entretenues avec l’Allemagne, pays amateur de safran local, ne pouvaient que favoriser la connaissance des idées nouvelles du protestantisme …
  • 1589 Cette culture donnait à Albas, une récolte si abondante qu’on y créa quatre foires par an et un marché par semaine pour la vente principalement du safran. Foires accordées sur la demande de l’Evêque Antoine d’Hébrard de Saint Sulpice.
  • 1736 La maison Jean Rodolphe Wetter de Marseille commande 200 livres de safran au courtier Boudet de la région de Caussade…
  • 1825 On note encore l’existence d’une foire au safran à Puylaroque.

LE SAFRAN, ÉPICE ET MONNAIE

  • 1444 Une bulle du pape Eugène IV de 1440, accorda au chapitre de Saint Antonin la dîme du safran.
  • 1480 Les consuls eurent recourt à la protection du chancelier de France auquel ils envoyèrent en présent trois livres de safran cultivé en Quercy et qui passait pour un des meilleurs de l’Europe.
  • 1686 Des pauvres gens ne se faisaient pas faute d’en piller la fleur, bien qu’il fût expressément défendu d’entrer dans les safranières …

LE SAFRANIER UN CAPITAL TRANSMIS EN HERITAGE

Les bulbes ou cormus qu’il contient sont un véritable cheptel végétal qui se multiplie en terre tous les ans.

  • 1457 Un marchand de Figeac lègue ses « saffraniés » à l’un de ses fils.
  • 1652 « A la fin du terme le métayer retire autant d’oignons qu’il en a planté »…

LA RENAISSANCE DU SAFRAN EN QUERCY

En Quercy, à la fin du XX siècle, peu de jardins ont conservé le safran ; les traditions s’éteignent. Les techniques particulières de culture du safran s’oublient mais quelques dizaines de petites safranières à l’écart, bien protégées, parfois abandonnées ont tenu bon. La tradition ancestrale s’est perpétuée et c’est ainsi que depuis plusieurs décennies la multiplication des bulbes d’origine a recommencé comme autrefois, de main de jardinier à main de jardinier, autour de Cajarc mais aussi dans tout le Quercy … L’épice n’a jamais cessé d’être récoltée, elle le fut au siècle dernier en toute confidentialité. L’ancrage historique et culturel de ce produit noble était en sommeil dans la mémoire collective. Les jardins Quercynois véritables conservatoires ont su garder cette semence prête à resurgir.

L’association ASPEC (Avenir et Sauvegarde du Patrimoine des Environs de Cajarc) initie en 1997 la redécouverte et travaille à la relance de la production. En conformité avec les principes de précaution et de conservation de la biodiversité elle participe en Mai 2001, avec des safraniers, à la création d’un conservatoire des souches locales du crocus sativus et des traditions safranières » Le Safranério ». Celui-ci s’appuie sur la construction d’un réseau de sites de conservation et de multiplication qui permet les échanges d’expériences et la réintroduction progressive des bulbes de souche dans les jardins et les nouvelles safranières. L’expérimentation des cultures faites depuis 1997 a montré une parfaite adaptation des souches locales qui témoignent de performances remarquables.