Une épice, une plante médicinale et tinctoriale.
Un patrimoine botanique et culinaire millénaire.
Le safran est à son apogée à l’époque médiévale.

Le safran, ou crocus sativus, produit avec ses pistils une épice qui vaut le prix de l’or !
Les arômes ont la chaleur du soleil ; il incarne à lui tout seul la flaveur de la cuisine méditerranéenne. Ce crocus adore la canicule ; en Quercy il pousse sur les causses arides et caillouteux. Le patrimoine végétal de nos jardins s’est constitué grâce à des plantes transmises de mains en mains et par des liens de filiation. Le safran est une de ces plantes de voyage qui a traversé les siècles à l’aide d’une longue chaîne de jardiniers. Il était déjà utilisé an Asie mineure 1600 ans avant JC. Le Crocus sativus L ou safran vrai est une herbacée vivace de la famille des iridacées. Il serait apparu au pied de l’Himalaya puis, de la Mésopotamie à l’Asie mineure, il a poursuivi sa route d’orient en occident.

DU BULBE A LA FLEUR

Le safran est issu du Crocus sativus L. (crocus cultivé) famille des iridacées. Plante stérile, sa bulbesmultiplication se fait uniquement par caïeux et grâce à l’intervention humaine par division des « touffes » de cormus. La plante démarre sa végétation début octobre avec l’apparition de magnifiques fleurs mauves. La croissance des feuilles durera tout l’hiver jusqu’au mois d’avril. En mai, disparaît le feuillage et débute la longue dormance estivale. Le crocus sativus affectionne les climats tempérés, il n’est pas exigent et donc facile à cultiver. Il aime les été chauds et secs mais s’accommode bien des régions plus humides sous réserve de le planter en terrain drainant ou pentu.

Bien connaître la plante, ses besoins, son cycle de vie, ses possibles périls, sont sans doute les clefs de la réussite. La production moyenne annuelle est variable de 10 à 12 Kg d’épice sèche à l’hectare, un m² produit en moyenne 1 gramme de safran pour une plantation initiale de 50 à 70 bulbes au m². Une poignée de bulbes replantés, il y a 10 ou 20 ans, par les pionniers du Quercy, en donne aujourd’hui après multiplication, plusieurs centaines de milliers.

Le safran ne s’arrose pas en été et sa production manuelle ne demande pas d’équipement spécifique. Le choix des bulbes de mise en culture est primordial pour réussir sa safranière. Les bulbes ou cormus (véritable nom des rhizomes) doivent être fermes, parfaitement sains, ni attaqués, ni blessés. Ils sont enveloppés d’une tunique fibreuse qui fait office de protection notamment contre la déshydratation estivale. Les bulbes d’importation ne sont pas toujours fiables ; ils sont parfois porteurs de champignons ou de virus qui provoquent la dégénérescence de la plantation.

Le safran cultivé est multiplié artificiellement et exclusivement par voir clonale depuis l’antiquité. Dans les conditions naturelles de développement il ne donne pas de graines comme dans une multiplication sexuée ce qui fait penser à un hybride. La multiplication est obtenue uniquement par la division des cayeux, nouveaux bulbes issus du bulbe mère. Cette multiplication évite donc de voir le safran se déplacer ou se multiplier seul en dehors de sa safranière ou de s’étendre d’un jardin à une prairie voisine. Cette reproduction conforme à l’original n’est pas sans inconvénient ; elle peut facilité la transmission à l’infini aux descendants d’un agent pathogène dont l’individu parent a pu subir l’attaque.

Les bulbes d’origine retrouvés en Quercy ont survécu après plusieurs centaines d’années de culture et, mieux encore, d’abandon en faisant preuve d’une excellente adaptation ; ils sont donc d’excellents sujets pour la multiplication et le redéploiement de la culture du safran.

La végétation démarre début octobre avec l’apparition de magnifiques fleurs mauves. La croissance des feuilles dure tout l’hiver jusqu’au mois d’avril. En mai, disparaît le feuillage et débute sa longue dormance estivale. Le bulbes ne fleurit qu’une année mais il se renouvelle en se multipliant sur sa partie supérieur sous forme de cayeux. 150 à 200 fleurs fournissent 1 g de safran sec, un m² produit en moyenne 1 gramme de safran pour une plantation initiale de 50 à 100 bulbes. LA 3 ème année, une touffe de 15 à 30 bulbes se trouve à la place de l’unique bulbe planté. Au mois de juin, les oignons sont récoltés et séchés dans un lieu ventilé. La nouvelle plantation se fait dans le courant de l’été, mais on peut très bien replanter aussitôt.

DE LA FLEUR A L’EPICE

La floraison débute avec les premiers jours d’octobre et dure environ 3 semaines. La fleur, éphémère, se récolte le jour même de sa sortie ; on la cueille entière en l’enveloppant dans la main. L’épluchage ou émondage consiste à séparer le pistil rouge divisé en trois stigmates du reste de la fleur. Cette tache ne doit pas attendre et doit se faire à la suite de la récolte. Chaque fleur est maintenue individuellement dans une main pendant que de l’autre on sépare les trois stigmates réunis en les pinçant entre le pouce et l’index. Le séchage permet la conservation de l’épice ; cette déshydratation peut se faire dans un simple four ménager à la température de 50°C. L’objectif est de réaliser en même temps l’évaporation de l’eau pour la conservation et une légère torréfaction nécessaire pour révéler les arômes ; au cours de cette opération le safran frais perd les 4/5 de son poids.

L’EPICE

Le vrai safran est une fragrance de la cuisine, il s’utilise à la manière d’un grand parfum. Pour une préparation de 10 personnes 0.2 à 0.3 grammes suffisent. Il s’utilise en stigmates et doit obligatoirement infuser quelques heures, voir une nuit, dans une ou deux cuillères à soupe d’eau chaude qui seront ensuite ajoutées à la préparation en fin de cuisson. Cette opération est tout à fait comparable à l’usage de la vanille en gousse. C’est une épice tout en arôme qui ne pique pas, en parfaite harmonie avec les poissons, crustacés et coquillages. On la retrouve dans la bouillabaisse, la sauce rouille ou le velouté de moules. Le safran rayonne avec les légumes et viandes blanches mais aussi parmi les desserts comme la glace ou la crème brûlée. En Quercy le safran a particulièrement marqué la gastronomie ; il était d’un usage courant mais son prix élevé le réservait toutefois aux plats des jours de fêtes ou à certaines réunions de familles. Les recettes locales tombées pour beaucoup dans l’oubli en conservent le témoignage : tripes au safran à la cadurcienne, tripes et pieds de porc cuits jusqu’à 12 heures au four à pain, le hochepot (viande de boeuf ou de mouton cuite au pot ou en ragoût avec des navets et des châtaignes), le « Mourtayrol » (pot au feu dont la recette est variable suivant les localités pouvait contenir de la poule, du boeuf et du jambon ainsi que toutes sortes de légumes). L’adjonction de safran dans le bouillon pour réaliser la soupe au pain est un grand classique ; Il était d’usage de servir ce plat aux repas de fêtes et de neuvaine.